Découverte
Le 13/10/2015 par Julie
Comment acheter du vin aux enchères aux Hospices de Beaune
Bon nombre d'amateurs de vin, Bourguignons, Français ou étrangers, ont ce rêve un peu fou d'enchérir un jour pour acheter leur propre pièce de vin aux Hospices de Beaune. Leur propre cuvée, achetée 2 mois à peine après la vendange, achetée dans l'effervescence de la Halle de Beaune, élevée patiemment puis mise en bouteille et étiquetée à leur nom.
Pour ceux qui voudraient sauter le pas et tenter l'aventure, nous avons interviewé Jean-Davis CAMUS, en charge des enchères et de la vente pour la maison Albert Bichot.
Avant d'acheter : connaître les essentiels de la vente
Les Hospices de Beaune sont un hôpital doublé d'un domaine viticole : une équipe est en charge de la culture de la vigne et de la vinification, mais la totalité des vins est vendue lors de la célèbre vente, le 3ème dimanche de novembre. Le bénéfice de la vente est intégralement reversé à l'hôpital (à l'exception de la Pièce de Charité, dont le bénéfice va à des associations caritatives), afin de financer son fonctionnement et ses projets. Il s'agit donc d'une vente caritative, dont un des objectifs est de soutenir l'hôpital et le patrimoine viticole bourguignon.
10 choses à savoir sur les Hospices de BeauneLes lots mis aux enchères sont des pièces, soit des tonneaux de vin qui donneront environ 288 bouteilles. Le vin n'a que 2 mois et doit encore être "élevé". Il provient des 60 hectares de vigne que possèdent les Hospices, fruits de donations reçues depuis leur fondation en 1453. La plupart des vins sont des crus de la Côte de Beaune (principalement autour des villages de Pommard, Volnay, Savigny et Corton), et 85% des lots sont des Premiers Crus ou des Grands Crus.
Conseils et astuces pour acquérir une pièce
Comment se déroule la vente ?
Les pièces de vin sont regroupées en lots d'une même cuvée, chaque cuvée et mise aux enchères l'une après l'autre, dans un ordre prédéterminé. Sont également déterminés le prix de départ de chaque enchère, ainsi que le "pas" d'augmentation des enchères. Un commissaire-priseur de la maison Christie's, qui organise la vente, suit la montée des enchères, entre des acquéreurs dans la salle, et d'autres qui peuvent enchérir par téléphone, sur Internet ou même en ayant déposé un ordre d'achat par courrier.
Que se passe-t-il après la vente ?
Immédiatement après une enchère "gagnante", il y a quelques papiers à signer pour l'officialiser. Il faut également valider la vente et payer le lot ainsi que les frais d'enchère. Au mois de décembre, les pièces sont à venir retirer à Beaune. Mais le vin est loin d'être fini : il doit encore être élevé, et il faudra pour cela faire appel à un vigneron ou un négociant-éleveur, qui se chargera de suivre le vin depuis sa mise en fût jusqu'à sa mise en bouteille (avec tout ce que ça implique de démarches œnologiques et administratives).
Combien coûte réellement une pièce aux enchères ?
Entre la commission de Christie's et les nombreux frais à considérer après la vente (dont le prix de l'élevage, du fût, de la mise en bouteille, de l'étiquetage…), on peut considérer que le coût total final est plus ou moins le double du prix marteau. Auquel il conviendra de rajouter la TVA, le cas échéant.
Il faut donc rester rationnel lorsque l'on fixe son seuil de prix maximum, et prendre en considération cette marge. Un conseil : déterminez votre budget total, déduisez-en votre prix-marteau maximum, et voyez ensuite sur quelles cuvées vous souhaiteriez enchérir en fonction de ce "budget-marteau". Libre à vous par la suite de revoir votre budget total s'il y a des pièces que vous tenez absolument à acquérir.
Quels sont les lots les plus recherchés ?
Deux critères font le prix : le caractère emblématique d'un lot (par exemple, la cuvée des Dames Hospitalières est toujours celle qui ouvre la vente, mais certains premiers crus comme les Bressandes sont aussi très recherchés), et la quantité, ou plutôt la faible quantité de pièces disponibles (le Bâtard-Montrachet, par exemple, ne représente que 4 pièces au total).
Avec un millésime comme 2015, les prix ne vont-ils pas s'envoler ?
Il est certain que le millésime a l'air particulièrement prometteur sur le plan de la qualité, mais cela ne présage pas pour autant de variations de prix, ni surtout de leur importance. En général, les hausses de prix tiennent aux quantités disponibles, à la répartition des pièces par cuvées : par exemple, une forte hausse s'est faite ressentir sur le Meursault Genévrières lorsque le nombre de pièces est passé de 20 à 12. Aussi, il est difficile de prévoir une hausse, et mieux vaut attendre encore quelques jours/semaines avant de se prononcer (d'ici la publication du catalogue et les prochaines dégustations des pièces par exemple).
QUI achète à Beaune ?
Les premiers acheteurs sont souvent des professionnels, principalement de la région : des négociants qui veulent proposer sous leur nom des cuvées des Hospices de Beaune, des restaurateurs, des hôteliers… Les particuliers, eux, s'y mettent souvent à plusieurs pour s'offrir ce petit luxe : ce sont tout de même 288 bouteilles d'une même cuvée, alors autant partager les bouteilles et les frais ! Jean-David Camus cite par exemple l'histoire de ces 2 amis, dont l'un a eu un enfant né en 2014 : ses 144 bouteilles seront conservées pour marquer les grands événements de la vie de cet enfant (et de ses parents, on s'en doute) !
La bonne méthode : faire appel à un expert
Evidemment, le mécanisme des enchères, gérées par la maison Christie's, permet à tous ceux qui en ont les moyens et le souhait de participer, enchérir, et se porter acquéreur d'une pièce. Il suffit pour cela de les contacter et de placer un ordre d'achat ou bien d'enchérir par téléphone, par internet ou bien depuis la salle, le jour de la vente. Mais pour cela, il ne faut pas seulement aimer le vin : il faut aussi aimer le risque !
Histoire de tirer le maximum de valeur de sa mise, pourquoi ne pas passer par un intermédiaire ?
- L'expertise des vins : les vins des Hospices sont à la dégustation pendant quelques semaines avant la vente. Ce sont des embryons de vins, tout juste vinifiés, des "ultra-primeurs" : l'exercice de la dégustation est technique et le palais d'un expert constitue une assurance non négligeable.
- L'expertise des enchères : pendant une vente aux enchères, tout se joue en moins d'une minute. Connaître son seuil, savoir s'il faut enchérir sur ce lot ou bien attendre le suivant, suivre les mouvements… Il faut avoir l'œil, et de préférence une bonne expérience des enchères de vin (idéalement de celle-ci en particulier) pour placer des offres justes.
- Le prix juste : un intermédiaire habitué des enchères et des commandes pour autrui n'a pas d'intérêt à faire flamber les prix. Son objectif est que chaque pièce qu'il acquiert soit adjugée à un prix juste et raisonnable. Avec l'expérience, il saura aussi à quel moment il faut "se battre" (c'est-à-dire : rarement sur la première pièce d'un lot, sauf si les quantités sont très faibles). Plus que cela, il saura vous conseiller les cuvées qui constitueront le meilleur rapport qualité-plaisir-prix pour vous, en fonction de vos goûts, de vos ambitions, et de votre budget.
- L'absence de risque : si vous passez un ordre auprès d'un intermédiaire, que vous lui avez indiqué votre budget et vos préférences, vous avez la garantie qu'il va suivre vos directives et ne pas s'en écarter. Aucun risque qu'il ne dépasse votre plafond budgétaire par exemple, se laissant emporter en se disant "après tout, on peut bien se faire plaisir".
- La tranquillité et le plaisir : une fois l'ordre passé, plus de pression sur vos épaules ! Pas besoin de vous concentrer sur la vente, pas besoin non plus de vous occuper des détails administratifs et techniques après celle-ci. Jean-David Camus explique que chez Albert Bichot, le prix est "tout compris", de la définition du projet d'achat à la livraison des bouteilles à domicile. Au fil de l'élevage du vin, les acheteurs sont même conviés à venir déguster au domaine, et peuvent suivre les grandes étapes par des vidéos ou des entretiens téléphoniques !
Acheter aux Hospices de Beaune avec Albert Bichot
La maison Albert Bichot, négociant historique et propriétaire de plusieurs domaines en Bourgogne, est depuis 15 ans le premier acheteur des Hospices de Beaune. En 15 ans, elle s'est portée acquéreur de la Pièce des Présidents 4 fois. En 2014, elle a acheté 84 pièces, sur 25 cuvées différentes (sur un total de 43 cuvées).
Elle propose via son site Hospices-Beaune.com de faire appel à elle pour soit acheter des pièces entières, soit acheter des bouteilles à l'unité (à partir de 3 bouteilles). Chaque année, 5 cuvées sont sélectionnées pour ces ventes à l'unité, typiquement 3 vins rouges et 2 vins blancs, avec une cuvée de Beaune et souvent un Corton.
Le jour de la vente, une petite équipe de la maison est dans la Halle de Beaune pour enchérir, à la fois pour les clients et pour la maison. Si des membres de l'équipe commerciale se relaient (la vente est longue…), on retrouve du début à la fin le même trio. Mais pour tenir le coup et rester concentré tout au long de la vente, sans pauses et sans relâche, chacun sa technique pour suivre les enchères et, lot après lot, satisfaire les demandes de chacun des clients de la maison : feuilles blanches A4, stylos de couleur et surligneurs pour Albéric Bichot, l'homme aux commandes de la maison ; catalogue papier de la vente pour Alain Serveau, directeur technique ; et fichier excel pour Jean-David Camus.
L'avantage : outre l'expertise qu'ils mettent au service de leurs clients, le prix "tout compris" et "sans surprise". Le prix marteau, la commission de la maison d'enchères, le fût, l'élevage, la mise en bouteille, les matières sèches (bouteilles, bouchons…), les étiquettes personnalisées, les caisses bois, la livraison en France, et la dégustation en cours d'élevage, en Bourgogne. On peut ensuite rajouter des options, comme des magnums et jéroboams, ou bien l'impression d'étiquettes différentes dans le cas d'acheteurs qui se seraient regroupés.
Merci à Jean-David Camus pour ses réponses et ses éclairages sur cette vente passionnante.
Quelques mots sur l'auteur : Julie
La créatrice et rédactrice-en-chef de la Feuille de Vigne partage son temps entre un bureau (avec vue sur les vignes) et les vignes de France et d'ailleurs, et ne cache pas son intérêt pour les bouteilles les plus surprenantes, les vignobles les plus inattendus, et les vins étranges et étrangers.
