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Billet d'Humeur

Le 5/06/2012 par Monsieur Septime

Septime se lance comme oenologue-conseil

Septime se lance comme oenologue-conseil

Tout goûteur sait que la dégustation de vin est un art bien difficile. On se trompe souvent et il faut savoir faire preuve d’une grande humilité pour pouvoir progresser. En tant que dégustateur, si se tromper est une chose, se faire piéger est encore plus redoutable car souvent imparable.

Dans le cadre d’un club d’œnologie totalement informel je suis amené à proposer trois dégustations par an à un groupe de 20/25 personnes. Une population pour partie fidèle et qui pour le dernier tiers se renouvelle à chaque dégustation. Ce groupe monte très vite à 75 personnes lorsqu’on fête le Beaujolais Nouveau en compagnie de Lilian Bauchet du Château des Bachelards. Le but de ces dégustations est de faire découvrir des régions ou des modes de productions, à l’exception de la dernière en date où pour l’occasion c’est une dégustation à l’aveugle qui a été proposée.

10 vins, bouteille habillée de chaussette, répartis en 4 séries, ont été servis: Blanc (deux blancs), Rouge 1 (trois rouges), Rouge 2 (deux rouges), Champagne (trois pétillants). Chaque dégustateur armé d’un crayon et d’une fiche de dégustation devait simplement relever les arômes, donner un prix indicatif et indiquer le vin préféré dans une série donnée.
La dégustation a été menée tambour battant. Les dégustateurs avaient pour consigne de recracher, prendre des notes et surtout ne rien dire. Suite à cette dégustation rapide, le deuxième temps de la soirée fut consacré au debrief. Les vins dégustés à nouveau étaient cette fois-ci présentés dans les formes; histoire du vigneron et du domaine, mode de culture et de production, philosophie sous-jacente.

Un Blaissac "rectifié" préféré aux meilleurs vins de la soirée

Toute catégorie confondue le vin préféré de la soirée a été le premier rouge de la série Rouge 1. C’était un Blaissac auquel j’avais ajouté du sirop Mûre/Cassis à hauteur de 5 ml/litre et de l’extrait de Vanille (pour le côté "élevé en fût de chêne").

Quelques dégustateurs ont tout de suite noté la présence très forte de la vanille. J’ai eu la main un peu lourde pour le coup; dose à diviser par deux une prochaine fois. Fraude classique pour rectifier un vin mais toujours intéressante à tester dans un strict cadre privé.

Le troisième vin était aussi un Blaissac mais non rectifié. Carafé depuis plusieurs heures pur essayer de l’arrondir un peu; rien n’y a fait, personne ne l’a apprécié.

Entre les deux Blaissac, j’ai servi un Clos Romain Phidias 2010. Ce vin au contraire n’a pas été du tout préparé à dessein; il a été proposé à la dégustation dès son ouverture. Il va sans dire que le vin a été peu apprécié. Mais lors du debrief je me suis fait un malin plaisir à présenter ce couple de vigneron hors norme par la force de leur engagement, le domaine qui abrite les plus vieilles mines de cuivre d’Europe, le travail sur des micro parcelles, la vinification en amphore. Une seconde bouteille est ouverte, le vin carafé avec grandiloquence, il est demandé de patienter 20 minutes avant de goûter à nouveau cette cuvée. La carafe posée sur la table, j’ai eu à peine le temps de tourner le dos, qu’elle était vide. Des vins mieux appréciés lorsque le dégustateur sait ce qu’il a dans son verre et a compris quelle était la démarche du vigneron.

Se faire tromper par ses propres sens

Le premier rouge de la seconde série des rouges, Rouge 2, était le premier vin blanc servi en début de dégustation mais teinté en rouge bordeaux par un colorant alimentaire neutre. Tout de suite les dégustateurs trouvent le vin suspect. Un manque de matière… j’aurais dû prendre un blanc plus charpenté. Mais les "cobayes" jouent tout de même le jeu de la dégustation et, pensant tout de même déguster un rouge, le notent. Ce blanc est un vin techno plutôt bien fait avec des notes florales très présentes. Servi pour un blanc, il a été relevé des parfums de fleurs blanches et de coing; servi en tant que rouge, ce sont des arômes de framboise qui on été notés. De façon claire la couleur a influencé la perception olfactive des dégustateurs.

Le deuxième rouge était là aussi un blanc. Parti de trop loin, il n’a trompé personne. En effet Vin de la communauté européenne produit par Joseph Verdier, c’est un cadeau de mon fromager chaque semaine car je suis un bon client. Les bouteilles s’entassent dans mon modeste appartement sans que je sache quoi en faire. Je croyais avoir trouvé là des débouchés possibles. Malheureusement même avec du sirop Mûre/Cassis et un colorant rouge je n’ai pu lui donner un semblant de qualité. Il rejoint le bas du classement avec le Blaissac non corrigé.

La dégustation des Champagnes étaient là aussi piégée puisqu’il n’y avait pas de Champagne. Ont été servi un demi-sec pétillant de Loire 100% Chenin, Un blanc de banc Chardonnay du Jura et un Crémant d’Alsace. Personne n’a détecté la supercherie. Le "Champagne" le mieux noté a été le demi-sec pétillant de Loire.

Parfois le déni…

Au-delà de cette "farce gustative", le plus intéressant a été les réactions des dégustateurs. Trois groupes se distinguent. Les jeunes adultes surpris avant tout d’avoir été trahis par leurs sens et de s’être fait piéger par un blanc teinté en rouge. Une dégustation qui pour eux fut matière à enseignement.

Le second groupe est composé de gens plus âgés qui l’ont pris plus comme une bonne farce mais qui n’impactera en rien leurs habitudes de consommation.

Le troisième groupe a refusé totalement la dégustation: les vins n’étaient pas bons, ils se sont tout de suite rendu compte que ce n’était pas des Champagnes etc… Un véritable déni.

A l’issue de la soirée, avec beaucoup d’humour tous ont considéré que j’avais gagné mes galons d’œnologue conseil. Ce que je retiens c’est que la prochaine fois que j’ai des invités à la maison, je ne me casserai pas trop la tête sur le vin à servir. Un Blaissac Mûre/Cassis/Vanille, et hop un bon vin à servir au repas.

Monsieur Septime


Quelques mots sur l'auteur : Monsieur Septime

Septime, que l'on appelle volontiers "Monsieur" Septime, est un homme aux visages multiples: consultant en management, spécialiste de la formation professionnelle, mais aussi un auteur passionné et un grand amateur de vin.

Il a fondé le site Mistelle.fr où l'on peut retrouver sa plume impertinente, acerbe, tranchée et souvent très juste. En librairies, c'est en tant que co-auteur de "La Face Cachée du Vin" qu'il se distingue; l'ouvrage, co-écrit avec Laurent Baraou, est paru en 2010 aux éditions François Bourin.

Monsieur Septime sur Facebook: Facebook.com/septime


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