Le 21/05/2013 par Antoon the Wine Patriot
Ça y est les notes sont sorties pour la majorité, les prix aussi!
Les commentaires de dégustation, grâce à l’efficacité des nouveaux outils nomades, sortent de plus en plus tôt. Ceci s’ajoute à la précocité de la dégustation de l’échantillon primeur, encore tout jeune.
Les propriétés ont rapidement dégainé cette année, craignant de ne pas vendre en raisons de différents facteurs:
Pour rester attractifs, les prix sont à la baisse par rapport au millésime précédent, avec environ 10 à 30% de moins pour les belles étiquettes habituées aux yoyos et à la vente quasi-exclusive en primeurs. Il y a évidement des exceptions:
Voilà, le tableau est peint avant même d’avoir parlé de la qualité intrinsèque du vin.
Nous avions déjà mis quelques jalons globaux sur ce millésime, notamment par le biais d'une entrevue avec Stéphane Derenoncourt, qui se confirment: un millésime facile d’accès pour le consommateur, grâce à son fruité, mais aussi une difficulté de choisir vu l’hétérogénéité des vins.
Pour ma part, je ne me prononce pas encore de façon individuelle. En effet, si en général les vins de 2012 me paraissent moins profonds que les classiques 2011, ils peuvent encore s’étoffer. Et certains dévoilent un grand intérêt, parfois plus que leurs mythiques aînés de 2009 et 2010.
J'en viens maintenant à la dégustation des Primeurs. Dans un article précédent, nous avions mis en lumière la variabilité de l’échantillonnage et donc sa fiabilité vis-à-vis de la bouteille. Dans ce post je ne reviendrais pas sur la véracité du prélèvement, mais plutôt sur nous: les dégustateurs et notre propre "variabilité".
En effet, s’il est facile d’incriminer les autres, il est toujours moins agréable de s'auto-critiquer. Nous avions également déjà mis en lumière, et mis en doute, l'objectivité du dégustateur et la véracité de son propos et de sa notation. Nous ne reviendrons donc pas non plus sur l’intégrité du critique ni sur nos différences d’appréciation, propres à chacun.
Alors sur quoi revenir?
Ce n’est pas un secret: pour certains, on commence à partir du 1er mars. Cette date est précoce et d'autant plus lorsque les vendanges ont été tardives, et donc également la fin des fermentations avec l’entonnage des vins en barriques. Ce qui donne en mars-avril des vins loin d’être stabilisés.
Sur une course de 1000m, prendre une photo à 400m et tenter de deviner le résultatEn sus, les vins sont plus particulièrement changeants à cette période; ceci les rend forcement plus compliqués à analyser. Ainsi entre le 1er mars et la saintcrosainte semaine des primeurs du 8 avril, il y a eu de l'évolution, du changement d’équilibre physico-chimique, dans la même prise d’échantillon (nous avons éliminé le fait que l'échantillonnage ait pu glisser vers des choses plus présentables / dégustables / améliorées).
Nous voyons donc l’hétérogénéité au moment où la photo a été prise. Nous pouvons faire le parallèle avec un 1000m, la ligne d’arrivée étant le moment de la mise en bouteille, et les "photos" sont prises respectivement le 1er mars, représentant les 404m, et le 8 avril pour les 500m. La maturité du vin étant une autre course, il existe donc des sprinters et des marathoniens.
Revenons ensuite sur l’ambiance de dégustation. Nous sommes conditionnés différemment si nous sommes au Château, soit dégustant à la barrique (là, les photos peuvent être une sorte de diaporama), soit tranquillement accueillis et écoutant l’argumentation du producteur. Ailleurs, chez un négociant ou une association (appellation/consultant/groupement), l'on est soit assis et servi, soit débout dans la cohue, pour comparer les vins entre eux.
Enfin, revenons sur les conditions du vin: la température de ce dernier, le laps de temps entre l'ouverture de l’échantillon et le service du verre de dégustation, autant de détails qui influent encore plus sur les caractéristiques si versatiles de l’exercice de dégustation en primeur
Bref, vous comprendrez que tout cela peut influencer la dégustation et corrompre l’avis du critique. Il est donc nécessaire pour lire cette photographie d’avoir du recul (pour mieux voir), de prendre en compte les différents éléments (le temps, le grain de tanins…), de déguster plusieurs fois (avoir plusieurs prises de vues) avant de se prononcer (sur le devenir du vin), d’avoir une certaine connaissance des choses et de les comprendre (l’œil et la sensibilité des choses).
Tout simplement à des références, à des personnes crédibles et intègres, autrement dit des personnes de compétence et de confiance. Ce qui n’exclut évidemment pas le droit à l’erreur, car le vin comme le vivant est une science inexacte. Finalement, les primeurs restent une affaire d’experts et de professionnels, mais attention aux usurpateurs ou aux prises d’intérêts!
Antoon –The Wine Patriot
Antoon Laurent s'auto-définit comme The Wine Patriot avant tout. Sa patrie? Le monde du vin, sous toutes ses coutures. Ingénieur vitivinicole de formation, vivant et travaillant depuis plusieurs années à Cognac, c'est un dégustateur hors pair qu'il est plus fréquent de croiser dans les vignes et les caves que derrière un bureau.
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